Notes d’intention
Par Thierry Pécou
Se rencontrer
À l’automne 2021, les musiciens de l’Ensemble Variances m’accompagneront au bord du fleuve Oyapock, au cœur de la forêt, pour rencontrer un groupe de musiciens wayãpi. Nous leur jouerons nos musiques, nous écouterons les leurs... Lors de ces moments d’échanges, en alternance, je serai attentif à ce qui pourra naître entre les deux parties. Parallèlement, l’artiste-vidéaste Laure Subreville construira un récit en images : entre moments de rencontre, mise en scène du mythe de la tortue par la jeunesse wayãpi et la nature luxuriante de la forêt tropicale.
Réaliser, faire partager...
De notre expérience à Camopi et de nos échanges avec les musiciens wayãpi, nous tirerons une matière à la fois documentaire et fictionnelle. La mise en forme de ces images fera l’objet d’une collaboration étroite avec Laure Subreville. Ce matériau vidéo sera structurellement associé à la composition musicale.
Par Laure Subreville
Un film, pour moi, ne commence pas par une idée, une intrigue, un événement ou un message. Un film naît en moi sous la forme d’une personne, une personne que je vois, que j’aperçois d’assez loin, le plus souvent dans un paysage. Je n’ai pas à inventer ou à imaginer : il ou elle est là. Et tout mon travail consiste à l’y rejoindre. Takwali, est une œuvre vidéo qui se tient au croisement des frontières. Musique et image se tissent dans une narration à plusieurs voix, entre musiciens au cœur de la forêt guyanaise.
Les musiques de Thierry Pécou et de la communauté wayãpi se mélangent aux sons ambiants de la forêt et du fleuve, dans un jeu de questions et de réponses. La musique fait résonner les liens invisibles entre les êtres, elle est une fête où l’on danse debout. Les musiciens wayãpi sont les figures d’une lutte identitaire en rupture avec le contexte géopolitique de la Guyane. La musique seule, traverse les frontières, les histoires et les cœurs.
Le fil conducteur de l’œuvre audiovisuelle Takwali, est le regard singulier que chaque musicien pose sur la création d’une musique, d’une danse, d’un chant, mais aussi la perpétuation des savoirs. Les musiciens wayãpi, tournés vers l’extérieur, vers le paysage, apprennent à jouer avec les musiciens de Thierry Pécou, à s’accorder intuitivement dans une sorte de longue prière collective. Takwali met en scène une forme de sociabilité archaïque, une amitié pure. La création d’un film est un subtil jeu d’équilibre où le réel, qu’il soit image ou son, doit être transformé, sculpté, afin de trouver une justesse dans l’émotion qui est transmise au spectateur.
L’enjeu de Takwali, autant dans la création des images que celle de la musique, réside dans la synchronicité des corps, la construction d’un mouvement partagé et d’une syntaxe collective, parfois au-delà des mots.
Par Guillaume Cassagnol
Pour faire écho à la musique des Wayãpi, qui prend place dans l’environnement sonore du village de Camopi et fait corps avec lui, pendant le spectacle sera diffusée une bande-son composée de sons ambiants, de la forêt et de la vie du village. Ces sons serviront d’écrin à la performance, de tissu immersif, et seront joués pour accompagner les musiciens sur scène. Mes field recordings [enregistrements de terrain] seront mon instrument, construit par mon expérience sensorielle en Amazonie, ma rencontre avec la culture wayãpi et passé au prisme de mes souvenirs.